| | Charles Baudelaire | |
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+5Aletheia Altaïr Eärlindë Kandjar Baudrim 9 participants | Auteur | Message |
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Baudrim Dors dans une bibliothèque
Nombre de messages : 57 Date d'inscription : 21/06/2005
| Sujet: Charles Baudelaire Mer 22 Juin à 13:18 | |
| "L'Etranger"
Qui aimes-tu le mieux, homme énigmatique, dis? Ton père, ta mère, ta soeur ou ton frère?
-Je n'ai ni père, ni mère, ni soeur, ni frère.
-Tes amis?
-Vous vous servez là d'une parole dont le sens m'est resté jusqu'à ce jour inconnu.
-Ta patrie?
-J'ignore sous quelle latitude elle est située.
-La beauté?
-Je l'aimerais volontiers, déesse et immortelle.
-L'or?
-Je le hais comme vous haïssez Dieu.
-Eh! qu'aimes-tu donc, extraordinaire étranger?
-J'aime les nuages... les nuages qui passent... là-bas... là-bas... les merveilleux nuages! | |
| | | Kandjar Sa carte de réduction jeunesse lui donne le droit de vous dire l'Absurde
Nombre de messages : 175 Date d'inscription : 21/06/2005
| Sujet: Re: Charles Baudelaire Mer 22 Juin à 13:26 | |
| "Une charogne"
Rappelez-vous l'objet que nous vîmes, mon âme, Ce beau matin d'été si doux : Au détour d'un sentier une charogne infâme Sur un lit semé de cailloux,
Les jambes en l'air, comme une femme lubrique, Brûlante et suant les poisons, Ouvrait d'une façon nonchalante et cynique Son ventre plein d'exhalaisons.
Le soleil rayonnait sur cette pourriture, Comme afin de la cuire à point, Et de rendre au centuple à la grande nature Tout ce qu'ensemble elle avait joint ;
Et le ciel regardait la carcasse superbe Comme une fleur s'épanouir. La puanteur était si forte, que sur l'herbe Vous crûtes vous évanouir.
Les mouches bourdonnaient sur ce ventre putride, D'où sortaient de noirs bataillons De larves, qui coulaient comme un épais liquide Le long de ces vivants haillons.
Tout cela descendait, montait comme une vague, Ou s'élançait en pétillant ; On eût dit que le corps, enflé d'un souffle vague, Vivait en se multipliant.
Et ce monde rendait une étrange musique, Comme l'eau courante et le vent, Ou le grain qu'un vanneur d'un mouvement rythmique Agite et tourne dans son van.
Les formes s'effaçaient et n'étaient plus qu'un rêve, Une ébauche lente à venir, Sur la toile oubliée, et que l'artiste achève Seulement par le souvenir.
Derrière les rochers une chienne inquiète Nous regardait d'un oeil fâché, Épiant le moment de reprendre au squelette Le morceau qu'elle avait lâché.
Et pourtant vous serez semblable à cette ordure, A cette horrible infection, Étoile de mes yeux, soleil de ma nature, Vous, mon ange et ma passion !
Oui ! telle vous serez, ô reine des grâces, Après les derniers sacrements, Quand vous irez, sous l'herbe et les floraisons grasses. Moisir parmi les ossements.
Alors, ô ma beauté ! dites à la vermine Qui vous mangera de baisers, Que j'ai gardé la forme et l'essence divine De mes amours décomposés ! | |
| | | Baudrim Dors dans une bibliothèque
Nombre de messages : 57 Date d'inscription : 21/06/2005
| Sujet: Re: Charles Baudelaire Mer 22 Juin à 13:29 | |
| "La cloche félée"
Il est amer et doux, pendant les nuits d'hiver, D'écouter, près du feu qui palpite et qui fume, Les souvenirs lointains lentement s'élever Au bruit des carillons qui chantent dans la brume.
Bienheureuse la cloche au gosier vigoureux Qui, malgré sa vieillesse, alerte et bien portante, Jette fidèlement son cri religieux, Ainsi qu'un vieux soldat qui veille sous la tente!
Moi, mon âme est fêlée, et lorsqu'en ses ennuis Elle veut de ses chants peupler l'air froid des nuits, Il arrive souvent que sa voix affaiblie
Semble le râle épais d'un blessé qu'on oublie Au bord d'un lac de sang, sous un grand tas de morts Et qui meurt, sans bouger, dans d'immenses efforts. | |
| | | Eärlindë Elfe de la bibliothèque
Nombre de messages : 697 Localisation : Dans mon arbre avec un livre Date d'inscription : 19/06/2005
| Sujet: Re: Charles Baudelaire Mer 22 Juin à 14:18 | |
| avec Baudelaire, je ne serai jamais objective, jamais. Voici mon préfèré, celui qui pour moi, fait tant ressurgir de souvenirs
De profundis clamavi
J'implore ta pitié, Toi, l'unique que j'aime, Du fond du gouffre obscur où mon coeur est tombé. C'est un univers morne à l'horizon plombé, Où nagent dans la nuit l'horreur et le blasphème ;
Un soleil sans chaleur plane au-dessus six mois, Et les six autres mois la nuit couvre la terre ; C'est un pays plus nu que la terre polaire ; - Ni bêtes, ni ruisseaux, ni verdure, ni bois !
Or il n'est pas d'horreur au monde qui surpasse La froide cruauté de ce soleil de glace Et cette immense nuit semblable au vieux Chaos ;
Je jalouse le sort des plus vils animaux Qui peuvent se plonger dans un sommeil stupide. Tant l'écheveau du temps lentement se dévide ! | |
| | | Baudrim Dors dans une bibliothèque
Nombre de messages : 57 Date d'inscription : 21/06/2005
| Sujet: Re: Charles Baudelaire Mer 22 Juin à 14:20 | |
| "Le Cygne"
Paris change! mais rien dans ma mélancolie N'a bougé! palais neufs, échafaudages, blocs, Vieux faubourgs, tout pour moi devient allégorie, Et mes chers souvenirs sont plus lourds que des rocs.
Aussi devant ce Louvre une image m'opprime Je pense à mon grand cygne, avec ses gestes fous Comme les exilés, ridicule et sublime, Et rongé d'un désir sans trêve! et puis à vous,
Andromaque, des bras d'un grand époux tombée, Vil bétail, sous la main du superbe Pyrrhus, Auprès d'un tombeau vide en extase courbée; Veuve d'Hector, hélas! et femme d''Hélénus!
Je pense à la négresse, amaigrie et phtisique, Piétinant dans la boue, et cherchant, l'oeil hagard, Les cocotiers absents de la superbe Afrique Derrière la muraille immense du brouillard;
A quiconque a perdu ce qui ne se retrouve Jamais, jamais! à ceux qui s'abreuvent de pleurs Et tètent la Douleur comme une bonne louve! Aux maigres orphelins séchant comme des fleurs!
Ainsi dans la forêt où mon esprit s'exile Un vieux Souvenir sonne à plein souffle du cor! Je pense aux matelots oubliés dans une île, Aux captifs, aux vaincus!... à bien d'autres encor! | |
| | | Altaïr Etoile endormie en boule, un livre sur les yeux
Nombre de messages : 129 Localisation : Perdue dans les étoiles Date d'inscription : 25/06/2005
| Sujet: Re: Charles Baudelaire Sam 25 Juin à 15:15 | |
| Un extrait que j'aime .... à entendre dans le film Immortal d'Enki Bilal
... Tout cela ne vaut pas le poison qui découle De tes yeux, de tes yeux verts, Lacs où mon âme tremble et se voit à l'envers... Mes songes viennent en foule Pour se désaltérer à ces gouffres amers.
Tout cela ne vaut pas le terrible prodige De ta salive qui mord, Qui plonge dans l'oubli mon âme sans remord, Et, charriant le vertige, La roule défaillante aux rives de la mort!
Extrait de Le Poison | |
| | | Kandjar Sa carte de réduction jeunesse lui donne le droit de vous dire l'Absurde
Nombre de messages : 175 Date d'inscription : 21/06/2005
| Sujet: Re: Charles Baudelaire Sam 25 Juin à 19:45 | |
| "Epigraphe pour un livre condamné"
Lecteur paisible et bucolique, Sobre et naïf homme de bien, Jette ce livre saturnien, Orgiaque et mélancolique. Si tu n'as fait ta rhétorique Chez Satan, le rusé doyen, Jette ! tu n'y comprendrais rien ; Ou tu me croirais hystérique. Mais si, sans se laisser charmer, Ton oeil sait plonger dans les gouffres, Lis-moi, pour apprendre à m'aimer ; Ame curieuse qui souffres Et vas cherchant ton paradis, Plains-moi !... sinon, je te maudis ! | |
| | | Altaïr Etoile endormie en boule, un livre sur les yeux
Nombre de messages : 129 Localisation : Perdue dans les étoiles Date d'inscription : 25/06/2005
| Sujet: Re: Charles Baudelaire Dim 26 Juin à 1:48 | |
| Le Voyage ...
Pour l'enfant, amoureux de cartes et d'estampes, L'univers est égal à son vaste appetit. Ah! Que le monde est grand à la clarté des lampes ! Aux yeux du souvenir que le monde est petit !
(...)
... Nous voulons, tant ce feu noux brûle le cerveau, Plonger au fond du gouffre, Enfer ou Ciel qu'importe? Au fond de l'inconnu pour trouver du nouveau ! | |
| | | Aletheia Encore un peu perdu sur le forum
Nombre de messages : 17 Date d'inscription : 21/06/2005
| Sujet: Re: Charles Baudelaire Dim 26 Juin à 3:03 | |
| moi non plus, je ne suis pas objective quand il s'agit de Baudelaire.. j'aime tant..
Recueillement Sois sage, ô ma douleur, et tiens-toi plus tranquille, Tu réclamais le soir, il descend, le voici : Une atmosphère obscure enveloppe la ville Aux uns portant la paix, aux autres le souci.
Pendant que des mortels, la multitude vile, Sous le fouet du plaisir, ce bourreau sans merci, Va cueillir des remords dans la fête servile, Ma douleur, donne-moi la main, viens par ici.
Loin d'eux. Vois se pencher les défuntes années Sur les balcons du ciel, en robes surrannées, Surgir du fond des eaux le regret souriant,
Le soleil moribond s'endormir sous une arche Et comme un long linceul traînant à l'Orient, Entends, ma chère, entends la douce nuit qui marche.
Et puis j'adore particulièrement le spleen "quand le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle sur l'esprit gémissant aux proies aux longs ennnuis, et que de l'horizon embrassant tout le cercle, il nous verse un jour noir plus triste que les nuits.." | |
| | | Nebelhime Nymphe
Nombre de messages : 14 Date d'inscription : 01/07/2005
| Sujet: Re: Charles Baudelaire Ven 1 Juil à 12:55 | |
| J'aime beaucoup "L'albatros" pour ma part ... Moi non plus je ne parviens pas à être objective, remarque. Pas avec Baudelaire ^^ "Souvent, pour s'amuser, les hommes d'équipage Prennent des albatros, vastes oiseaux des mers, Qui suivent, indolents compagnons de voyage, Le navire glissant sur les gouffres amers. A peine les ont-ils déposés sur les planches, Que ces rois de l'azur, maladroits et honteux, Laissent piteusement leurs grandes ailes blanches Comme des avirons traîner à coté d'eux. Ce voyageur ailé, comme il est gauche et veule! Lui, naguère si beau, qu'il est comique et laid! L'un agace son bec avec un brûle-gueule, L'autre mime, en boitant, l'infirme qui volait! Le Poête est semblable au prince des nuées Qui hante la tempête et se rit de l'archer; Exilé sur le sol au milieu des huées, Ses ailes de géant l'empêchent de marcher." | |
| | | Enirth Dors dans une bibliothèque
Nombre de messages : 62 Localisation : Entre points et silences Date d'inscription : 20/06/2005
| Sujet: Re: Charles Baudelaire Sam 2 Juil à 17:16 | |
| Guignon
Pour soulever un poids si lourd Sisyphe il faudrait ton courage Bien qu'on aie du coeur a l'ouvrage L'Art est long et le Temps est court
Loin des sepultures celebres Vers un cimetiere isolé Mon coeur comme un tambour voilé Va battant des marches funebres
- Maint joyau dort enseveli Dans les tenebres et l'oubli Bien loin des pioches et des sondes
- Mainte fleur epanche a regret Son parfum doux comme un secret Dans les solitudes profondes | |
| | | Melmoth A peur de parler
Nombre de messages : 7 Date d'inscription : 03/07/2005
| Sujet: Re: Charles Baudelaire Dim 3 Juil à 16:58 | |
| LXXVIII - Spleen
Quand le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle Sur l'esprit gémissant en proie aux longs ennuis, Et que de l'horizon embrassant tout le cercle II nous verse un jour noir plus triste que les nuits;
Quand la terre est changée en un cachot humide, Où l'Espérance, comme une chauve-souris, S'en va battant les murs de son aile timide Et se cognant la tête à des plafonds pourris;
Quand la pluie étalant ses immenses traînées D'une vaste prison imite les barreaux, Et qu'un peuple muet d'infâmes araignées Vient tendre ses filets au fond de nos cerveaux,
Des cloches tout à coup sautent avec furie Et lancent vers le ciel un affreux hurlement, Ainsi que des esprits errants et sans patrie Qui se mettent à geindre opiniâtrement.
- Et de longs corbillards, sans tambours ni musique, Défilent lentement dans mon âme; l'Espoir, Vaincu, pleure, et l'Angoisse atroce, despotique, Sur mon crâne incliné plante son drapeau noir. | |
| | | Enirth Dors dans une bibliothèque
Nombre de messages : 62 Localisation : Entre points et silences Date d'inscription : 20/06/2005
| Sujet: Re: Charles Baudelaire Dim 3 Juil à 17:19 | |
| Le meilleur des Spleens selon moi. | |
| | | Gabriel Encore un peu perdu sur le forum
Nombre de messages : 16 Localisation : Ici et ailleur Date d'inscription : 15/08/2005
| Sujet: Re: Charles Baudelaire Mar 16 Aoû à 0:51 | |
| La mort des amants
Nous aurons des lits pleins d'odeurs légères, Des divans profonds comme des tombeaux, Et d'étranges fleurs sur des étagères, Ecloses pour nous sous des cieux plus beaux.
Usant à l'envi leurs chaleurs dernières, Nos deux coeurs seront deux vastes flambeaux, Qui réfléchiront leurs doubles lumières Dans nos deux esprits, ces miroirs jumeaux.
Un soir fait de rose et de bleu mystique, Nous échangerons un éclair unique, Comme un long sanglot, tout chargé d'adieux ;
Et plus tard un Ange, entr'ouvrant les portes, Viendra ranimer, fidèle et joyeux, Les miroirs ternis et les flammes mortes. | |
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| Sujet: Re: Charles Baudelaire | |
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| | | | Charles Baudelaire | |
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